Bilan 2018 et perspectives 2019 : Interview de M.DIOUF, Directeur de l’UMOA-Titres

Bilan 2018 et perspectives 2019 : Interview de M.DIOUF, Directeur de l’UMOA-Titres

 

Quel bilan faites-vous des émissions de titres publics des Etats membres de l’UEMOA au titre de l’année 2018 ?

Tout d’abord, je tiens à présenter mes vœux les meilleurs pour cette année 2019 à tous les acteurs du Marché des Titres Publics par adjudication de l’UEMOA ainsi qu’à l’ensemble des parties prenantes du Marché Financier  A fin Décembre 2018, 2 400 milliards de FCFA ont été mobilisés par les Etats sur le marché régional par adjudication avec un taux de couverture d’environ 111%. Ainsi, les montants levés restent honorables et s’inscrivent dans les mêmes grandeurs que ceux des années passées même s’il convient de noter une prépondérance des émissions d’Obligations Assimilables du Trésor (OAT) représentant 60% contre 40% de Bons Assimilables du Trésor (BAT) comparativement à 2017 dont la répartition était de 57% d’émissions de BAT contre 43% d’OAT.

Pouvez-vous revenir sur l’actualité marquante de l’UMOA-Titres en 2018 ?

Toutes les actions de l’UMOA-Titres visent à bâtir, en collaboration avec l’ensemble des acteurs, un Marché des Titres Publics (MTP) susceptible d’assurer le financement efficient du développement des Etats membres de l’Union. Aussi, à l’instar des années précédentes, nous avons focalisé nos efforts sur la recherche de solutions adéquates aux problématiques des investisseurs aussi bien qu’à celles des émetteurs.

A cet effet, nous pouvons citer notamment un recours plus accru des Etats aux opérations d’adjudications ciblées. Ces émissions spécifiques, ouvertes exclusivement aux soumissions directes des SVT, au-delà de la mobilisation de ressources importantes sur des maturités moyen terme, avaient également pour objectif de contribuer à la diversification de la base d’investisseurs.

L’année 2018 a par ailleurs, vu la poursuite des projets clés pour l’approfondissement du Marché des Titres Publics, en l’occurrence la notation financière des Etats membres, l’élaboration d’une courbe des taux, l’accessibilité directe des SGI au marché par adjudication.

En outre, l’UT a engagé des actions visant à réaliser un profilage et une segmentation de la base des investisseurs non bancaires notamment les compagnies d’assurances de la zone UEMOA. Cette étude a permis d’appréhender l’évolution du portefeuille d’investissement des compagnies d’assurances et de déterminer les caractéristiques de titres publics qui seraient les plus adaptés à leur besoin au regard de leur processus d’investissement. Ces éléments permettront d’amorcer l’exécution d’une stratégie plus ciblée et optimisée à l’endroit des acteurs de ce secteur.

Quel bilan faites-vous de l’activité 2018 des Spécialistes en Valeurs du Trésor ?

Au cours de l’année 2018, l’UMOA-Titres a procédé à l’évaluation annuelle de la performance des SVT en se basant sur les critères prévus par la charte, à savoir la participation aux adjudications, la présence sur le marché secondaire et la qualité de service. Cette évaluation a abouti à un classement que vous pouvez retrouver sur le site internet de l’UT.

A titre de rappel, le 1er Mars 2016 a marqué le démarrage des activités des premiers Spécialistes en Valeurs du Trésor (SVT) de la région. Ce statut très particulier, conférant à ses détenteurs des avantages mais aussi des engagements consignés dans une charte signée par les différentes parties, était attribué pour une durée de trois (3) ans renouvelable. A la veille du renouvellement de ce statut, l’UT, en collaboration avec les Trésors nationaux et les SVT, dressera le bilan de cette activité en vue d’y apporter des améliorations si nécessaire, qui contribueraient à faire du système des SVT, un véritable moteur du financement des Etats au travers des marchés financiers. L’objectif est de parvenir à l’opérationnalisation de ce nouveau cadre en 2019.

Que peut-on dire sur l’accessibilité directe des SGI au marché primaire des titres publics émis par voie d’adjudication est-elle toujours d’actualité ?

Comme vous le savez, dans le cadre des actions visant la diversification de la base des investisseurs, l’Agence a identifié les SGI comme de potentiels vecteurs de cette diversification au regard de leurs capacités de distribution de produits financiers aux clients institutionnels non-bancaires. Cet accès direct vise à accroitre la participation au Marché primaire des Titres Publics des acteurs non bancaires, à diversifier la base des investisseurs, en comptant sur la capacité de distribution des SGI à démarcher des investisseurs non bancaires.

L’année 2018 a été consacrée à la mise en œuvre d’un plan d’actions. A date, l’UT travaille avec la BCEAO sur les modalités pratiques d’opérationnalisation effective de la participation directe des SGI au marché par adjudication.

Quel état d’avancement peut-on dresser sur les projets relatifs à la notation financière des Etats de l’Union et la construction d’une courbe des taux du marché ?

De façon générale, une avancée notable peut être enregistrée sur ces projets importants.

Dans le cadre du processus de notation financière sur une échelle régionale, le principe d’une seule notation par Etat a été retenu. Les agences Bloomfield et WARA ont effectivement démarré leurs travaux. Ainsi, le processus est enclenché pour la majorité des Etats. Les notations devraient être mises à la disposition des Etats au cours du premier trimestre 2019.

Concernant le projet la construction d’une courbe des taux, les travaux ont abouti à l’élaboration d’une méthodologie de mise en place d’une première version de courbes des taux pour chacun des émetteurs. La mise en œuvre de ce modèle va aboutir dans les jours à venir, à la publication, sur le site web de l’UT, de courbes de taux zéro-Coupon des Etats membres de l’Union.

Qu’en est-il du projet de certification financière des acteurs du Marché Financier Régional ?

Le projet de certification financière des acteurs du Marché Financier Régional suit son cours. En effet, le bon fonctionnement d’un marché implique que les acteurs disposent de connaissances et compétences nécessaires pour assurer le respect des règles d’investissement et tirer profit des opportunités sur ce marché. Ainsi, en 2018, l’Agence a entrepris l’élaboration et l’opérationnalisation d’un programme de certification des acteurs du Marché des Titres Publics (MTP) en partenariat avec Chartered Institute for Securities & Investment (CISI), une référence mondiale en la matière basée à Londres. A date, les procédures administratives sont en cours de finalisation et la première session de certification des acteurs devrait démarrer au cours du premier trimestre 2019.

Vous avez signé un protocole d’accord avec le Centre de Recherches Economiques Appliquées (CREA) de la Faculté des Sciences Economiques et de Gestion (FASEG) de l’Université Cheick Anta Diop du Sénégal. En quoi consiste cette collaboration ?

Maintenir le Marché des Titres Publics de l’UEMOA dans une perspective de développement constant, tel est l’objectif qui a conduit l’UMOA-Titres à conclure un accord de collaboration avec ce Centre de Recherche d’Économie Appliquée (CREA) qui, à travers ses partenaires techniques, rayonne sur toute la région. Cette collaboration va consister à œuvrer conjointement pour le développement des mécanismes régissant le Marché des Titres Publics de l’UEMOA. A terme, ce partenariat devrait permettre des avancées notables dans le domaine de la recherche avec des actions permettant de mieux connaître les mécanismes macroéconomiques et financiers ainsi que les comportements des acteurs qui sous-tendent le fonctionnement du marché financier régional.

Plus concrètement, un programme de recherche pluriannuel sera élaboré et mis à jour suivant les évolutions du marché et les attentes du moment. Afin de concrétiser cette volonté de faire de la recherche un véritable vecteur d’analyse et de développement de marché, les domaines de recherches du protocole d’accord porteront notamment sur la courbe des taux, la notation financière des Etats, la gestion des risques et produits de couverture, les facteurs explicatifs du comportement des investisseurs, la mesure de liquidité et de la capacité d’absorption des titres publics  et les déterminants des taux de sortie des titres publics émis par voie d’adjudication.

Nous avons noté que le site internet de l’UT a fait peau neuve, qu’est ce qui a poussé à cette démarche ?

L’UMOA-Titres a souhaité proposer aux acteurs du marché ainsi qu’aux investisseurs actifs et potentiels, une vitrine optimisée du Marché des Titres Publics. A cet égard, le nouveau site est conçu pour mieux promouvoir les titres publics et répondre aux besoins des investisseurs à travers une ergonomie et des fonctionnalités centrées sur le visiteur.

Cette nouvelle plateforme intègre un certain nombre d’innovations parmi lesquelles une page d’accueil plus fournie sur l’actualité du marché par adjudication, une présentation plus optimale des émissions de titres publics, un espace dédié aux intermédiaires de marché, la possibilité d’ajouter le calendrier des émissions à votre agenda électronique ou de bénéficier de ressources didactiques sur le nouveau Blog du MTP. Ainsi, les acteurs du marché pourront consulter, télécharger en format Excel/PDF ou imprimer des données sur les émissions de titres publics selon les critères de leur choix, retrouver davantage de données économiques des Etats membres de la zone UEMOA, calculer en toute simplicité leur retour sur investissement grâce au calculateur d’intérêt ou télécharger des ressources techniques utiles pour leurs prises de décisions.

Quel message souhaitez-vous adresser aux investisseurs actifs et potentiels au sujet du Marché des Titres Publics de l’UEMOA ?

Je souhaite renouveler mes vœux les meilleurs et relever les nombreux défis pour la nouvelle année. En effet, 2019 verra la mise en œuvre des projets initiés et la consolidation des acquis avec notamment :

  • la mise en place des infrastructures pour impulser le bon fonctionnement du marché secondaire des titres publics ;
  • la vulgarisation du Marché des Titres Publics et les bonnes pratiques de marché aussi bien pour les investisseurs que les émetteurs ;
  • le renforcement de la standardisation des instruments émis.

En termes de besoins de financement, les Etats de la zone UEMOA devraient encore recourir au marché local aux mêmes niveaux que ceux observés sur les années précédentes. Une communication efficiente avec les acteurs du marché sera au cœur des préoccupations des émetteurs en vue d’améliorer la couverture de leurs opérations tant en termes de volume que de coût de la ressource mobilisée.

Cependant le défi majeur du Marché des Titres Publics par adjudication de la zone UEMOA demeure la diversification de la base des investisseurs que l’UT continuera à relever au cours de l’année 2019.